Éducation thérapeutique du patient : dernière partie

Cette photo représente pour moi les patients et les professionnels de santé tous dans l’aventure de l’Education Thérapeutique du Patient (ETP). J’ai fini il y a un mois maintenant ma formation et j’ai choisi d’attendre quelques semaines avant d’écrire cet article pour voir ce que j’en retenait.Voilà la synthèse de ma dernière session. Gaële Bouric était notre formatrice et nous a accompagné seule pour notre dernière séance.

Revoir la définition de l’Éducation Thérapeutique du Patient (ETP)

1ère journée : on repart tout doucement. On sent que le délai entre ces deux sessions a été plus long que celui d’avant donc Gaële décide de repartir sur la base : la définition de l’ETP.

Cette définition de l’ETP pose un problème dans la mesure où elle implique un cadre précis alors que l’ETP doit être une démarche sur mesure. Gaële rappelle aussi le but de l’ETP : on ne cherche pas à avoir des patients obéissants qui sont dans l’observance mais au contraire des patients qui sont dans la recherche de l’amélioration de leur qualité de vie.

L’ETP n’est pas évidente à mettre en place mais quand un patient a goûté à ça dans un domaine, il ne gérera plus jamais sa santé pareil, ce qui est plutôt positif… Il ne reste plus qu’à espérer que l’ETP essaime à partir de la demande des patients et que tous les professionnels de santé se sentent concernés par cette démarche…

Gaële reprend aussi des notions déjà vues à la session d’avant, la différence entre empathie et sympathie. Dans l’empathie on est dans l’émotion mais on prend du recul pour aider l’autre tandis que dans la sympathie on pleure avec l’autre donc en ETP on est plutôt empathique.

Qu’est-ce-que le diagnostic éducatif ?

Les étapes de l’éducation thérapeutique sont :

  • le diagnostic éducatif partagé
  • la pose d’objectifs thérapeutiques
  • l’intervention
  • l’évaluation

Le diagnostic éducatif est une synthèse de la situation avec le choix des objectifs que l’on va vouloir atteindre. Il dépend de l’image du professionnel de santé en face, de son métier. En fonction du métier de la personne en face de lui, le patient ne va pas proposer les mêmes objectifs à atteindre. Ce diagnostic se met en place progressivement et il évolue dans le temps.

Qu’est-ce qui motive un patient ?

Pour mettre en place une démarche commune d’ETP entre le soignant et le patient, il est important de savoir ce qui motive le patient, pour pouvoir s’y référer dans les moments difficiles.

La motivation est basée sur 2 postulats : la liberté et le choix d’un objectif.

Pour pratiquer l’entretien motivationnel, Gaële nous recommande deux livres :

Trouver « L’entretien motivationnel – 2e éd. – Aider la personne à engager le changement »

Trouver « Pratique de l’entretien motivationnel: Communiquer avec le patient en consultation »

C’est la fin de la 1ère journée de formation.

Comment nous faire prendre conscience en direct de la nécessité du temps d’intégration

Au début de cette dernière journée de la formation Education Thérapeutique du Patient, Gaële commence par un tour de table sur ce qui nous est resté d’hier. Euh… pas toujours facile d’intégrer autant d’informations en si peu de temps. C’est l’occasion pour la formatrice de nous faire prendre conscience du temps nécessaire pour intégrer une information ou encore un comportement que ce soit pour nous soignants ou pour les patients. Sa technique pour que nous intégrions l’importance du temps en la ressentant nous-même s’appelle l’effet miroir.

L’entretien motivationnel, un outil pour faciliter la motivation !

On repart sur la notion de motivation, et sur comment on peut l’amener chez un patient grâce à un outil : l’entretien motivationnel (dont personnellement je n’avais jamais entendu parler). Gaële explique que en tant que tabacologue elle a souvent recours à cette technique et que nous aussi en tant que Masseur-Kinésithérapeute, nous pouvons l’adapter à notre pratique pour travailler avec les patients.

Qu’est-ce-que l’entretien motivationnel ?

Un des obstacles à l’atteinte des objectifs fixés est la collision entre le réflexe correcteur et l’ambivalence. Par exemple, vouloir faire du sport pour un corps en bonne santé mais manger plein de saloperies sucrées. En tant que soignant on doit accompagner le changement et essayer d’aider le patient à se rappeler son objectif et pourquoi il l’a choisi initialement pour qu’il puisse continuer à le re choisir à cet instant là et non pas céder à la tentation.

Comment être un bon soignant-accompagnant ?

Les 3 qualités pour être un bon thérapeute capable d’aider son patient sont selon Carl Rogers, psychologue américain qui a travaillé sur la qualité de la relation entre un patient et son thérapeute :

  • l’empathie
  • la chaleur
  • l’authenticité

L’empathie, la chaleur et l’authenticité permettent d’être un bon soignant-accompagnant. Ce n’est pas du tout comme ça que nous avons été formaté en tant que kiné, et plus généralement en tant que professionnel de santé… Au contraire, l’idée est que une fois la blouse mise, on a une image à tenir et que ce que nous sommes personnellement ne doit pas transparaître. Autant dire que aller vers la chaleur et l’authenticité, ça ne fait pas vraiment parti de notre culture de soignant. D’un autre côté pour moi je suis contente d’entendre ça parce que ça a toujours été très dur de devoir tendre à être neutre 😉

Comment réaliser un entretien motivationnel ?

Pour gérer une résistance chez son patient, au lieu d’être en opposition il faut essayer de « rouler avec la résistance » en demandant ce qui va se passer après si effectivement on part sur l’idée de ne pas respecter son objectif initial. Cet effort d’imagination aide le patient à aller plus loin que si le praticien commence à s’opposer directement.

Pour renforcer le sentiment d’efficacité personnelle, le praticien peut demander au patient « qu’est-ce que vous avez réussi dans votre vie » et faire des parallèles.

L’utilisation du diagnostic éducatif a une effet positif pour le kiné parce qu’il augmente la perception par le soignant de la motivation du patient. Comme ça on arrête de se plaindre que les patients « ne sont pas motivés »

L’éducation Thérapeutique du patient peut aussi être fait en groupe mais attention, les bénéfices liées au travail de groupe implique qu’il y ait un respect de tous et pas d’esprit de chapelle.

Qu’est-ce-que cette formation m’a apporté ?

Je suis absolument ravie d’avoir fait cette formation en Éducation Thérapeutique du Patient. Le groupe a été riche en interactions (oui je sais, c’est parce qu’on était pleins de « personnes-ressources » 😉 ) et les jeux de rôles nous ont aidé à voir les difficultés à appliquer l’ETP dans « la vraie vie » (genre gestion d’un groupe avec patient agressif, comment refuser de prendre un RDV à 21H30, comment discuter avec un patient fermé… je sais que mes collègues s’y reconnaîtront).

Je pense que c’est cette formation qui a le plus modifié ma pratique de toutes celles que j’ai faites. Je trouve que le format de formation qui nous a été proposé en étalant les 6 jours de formation sur 3 mois est intéressant parce qu’il laisse le temps d’essayer de l’utiliser au cabinet. Malgré tout une fois que c’est fini, j’ai vraiment l’impression de mettre en application que 10% de ce que j’ai appris. Mais comme dirait Gaële, « en éducation thérapeutique du patient il faut aller à petits pas : grand semeur, petit récolteur » alors j’espère continuer à m’améliorer. En tout cas j’utilise ces outils tous les jours. Par exemple, sur Twitter, quelques cas en direct :

Hier mise en pratique de l’ETP : au lieu de montrer les étirements qu’il devait faire à mon patient, je lui ai demandé s’il en connaissait !

Et du coup je suis partie de ceux qu’il connaissait pour corriger ce qui n’allait pas, et lui en apprendre de nouveau.

Un autre changement que j’ai mis en place. Au lieu de faire les séances et de donner des choses à faire à l’extérieur du cabinet à la fin de la prescription, j’introduis les exercices ou l’auto-drainage beaucoup plus tôt dans la rééducation et je les considère non plus comme quelque chose d’accessoire qui vient après mais au contraire comme faisant partie du programme. Et quand j’ai ce genre de retour, je sais que je suis sur la bonne piste :

Une patiente à qui j’explique l’autodrainage dès la 2e séance « c’est génial je vais pouvoir faire quelque chose pour moi… et ne plus subir »

Suite à ma formation en Éducation Thérapeutique du Patient, j’ai aussi décidé de reprendre le Bilan Diagnostic Kiné (BDK) dans le cadre du cancer du sein. Je suis en train de travailler dessus pour essayer de faire qu’il soit synthétique mais complet, qu’il puisse servir de liaison avec le médecin traitant ou l’oncologue et qu’il intègre des éléments d’ETP avec par exemple un questionnaire d’auto-évaluation que le patient remplira seul puisque le but n’est plus de diriger en tant que soignant mais de collaborer avec le patient.

Voilà quelques pistes suite à cette formation. J’aurais aimé rencontré le groupe de kiné qui avaient faits cette formation un an avant nous pour voir ce qui leur en était resté avec plus de recul. Malheureusement cette formation n’aura plus lieu, en tout cas plus sous cette forme puisque l’URPS Poitou-Charentes disparaît… Merci encore une fois aux formateurs Gaële Bouric et Dominique Delplanque qui ont assuré.

Si vous avez des précisions ou une expérience en ETP, n’hésitez pas à en parler dans les commentaires, que ce soit en tant que patient ou en tant que professionnel. Si vous voulez retrouver le résumé de la 2ème session en éducation thérapeutique du patient, c’est ici :

Éducation thérapeutique du patient quézako ? Partie 1

Éducation thérapeutique du patient quézako ? Partie 2

Finalement, je reprendrais en conclusion de cet article un tweet de ma meilleure amie :

« Avant j’écoutais les patients, maintenant je les entends ». Ou comment l’ETP change nos pratiques.

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